Complément d’interview : sondages et prudence
Complément d’interview : sondages et prudence

Complément d’interview : sondages et prudence

Il y a quelques jours, j’ai eu le privilège de répondre à quelques questions pour le site Réformés.ch, et ce à l’occasion d’un cours en ligne donné pour la HET-Pro sur “Médias, vérité, et communication”. en relisant l’article en ligne, je voulais ajouter une petite réflexion complémentaire à la réponse suivante.

Question : Statistiquement, les évangéliques semblent sur-représentés chez les adeptes de Qanon, les coronasceptiques ou encore les antivax: comment comprendre le succès de ces courants d’idées dans ces milieux ?

Réponse publiée : Statistiquement, les évangéliques semblent sur-représentés chez les adeptes de Qanon, les coronasceptiques ou encore les antivax: comment comprendre le succès de ces courants d’idées dans ces milieux?

Complément : Dire cela n’enlève rien à l’entreprise statistique elle-même. Cependant, même les informations présentées par un sondage comme celiu

La prudence est d’autant plus de mise que les titres résumant les rapports sont souvent fait pour marquer les esprits, plus que pour nuancer les propos. Ainsi, Salon peut titrer “Devout Christians are much more likely to fall for QAnon conspiracies: poll” tout en indiquant de suite “White evangelicals appear to be much more likely to believe in conspiracy theories, a new poll found.” La tension entre les deux informations trahit une relation ambigüe avec les données du dit sondage.

Il est aussi crucial de bien porter attention aux indications données par le sondage avant de construire toute une interprétation du paysage ethnico-religieux des Etats-Unis. Par exemple, il faut reconnaître une certaine ambiguïté dans le texte des résultats de droite.

De plus, les résultats officiels disponibles ici ne permettent pas aussi facilement d’établir une causalité entre l’appartenance religieuse et la croyance dans les fake news référées ci-dessus. C’est une possibilité, mais la manière dont le sondage parvient à la statistique en question n’est pas explicitée. Nous avons bien les réponses aux deux questions ci-dessous, mais pas la relation établie entre les deux.

Je ne dis pas que les résultats présentés par YouGov et The Economist sont erronés, simplement qu’il convient peut-être de se demander comment la corrélation entre les résultats a été interprétée comme causalité. Ceci est l’un des plus grands problèmes dans l’interprétation des données statistiques. Si le “répondant” n’indique pas de lui-même une telle causalité (et pas une simple corrélation), la prudence doit être de mise. C’est le ca,s il me semble, de la conclusion suivante :

“Par rapport aux autres américains, les évangéliques blancs ont 34 points de pourcentage de plus d’être susceptibles de croire que des “millions de votes illégaux” ont été émis lors de l’élection de 2020″, selon The Economist. “Ces adultes ont également tendance à être plus conservateurs et à voter pour des politiciens républicains plus souvent que les non-Blancs et les membres d’autres groupes religieux. Les évangéliques sont influencés par la ligne officielle du parti sur les questions du jour – même si elles sont conspirationnistes. Et l’adoption d’une théorie sauvage, peut-être rendue plus persuasive par les aveux d’un politicien, tend à conduire à l’adoption d’autres.” (rapporté par l’article de Salon).

C’est le type de relation causale qui n’est pas a priori suffisamment attesté. Cela signifie-t-il qu’il soit alors possible de dénoncer une campagne anti-évangélique de quelle que sorte que ce soit. Non, bien sûr. Il s’agit simplement de considérer avec prudence les résultats d’un sondage en faisant attention à ce qu’ils disent et surtout… ce qu’ils ne disent pas. Il s’agit aussi de faire attention à la manière dont nous prenons la parole. Republier les résultats d’un sondage ne suffisent pas. Les commenter hâtivement non plus.

Encore et toujours il est question de parole. Parole lue, exprimée, et projetée sur les médias sociaux d’une manière semi-publique qui, que nous le voulions ou non, marquera le nom de Christ. Je crois que la sagesse chrétienne, qui se manifeste dans un principe important de charité (essayer de toujours adopter l’interprétation la plus charitable), nous distinguerait vraiment d’une société dans laquelle les lignes de division et les interprétations radicales sont souvent favorisées.

Prions pour que Dieu demeure pour nous l’Esprit de la sagesse de Christ, Esprit de patience, de bonté, et de bienveillance.