Quel est le point commun entre un écrivain, un lion, un apprenti tentateur, la littérature du seizième siècle, le curieux mot « apologétique », des centaures, la planète Venus, un professeur d’Oxford et la foi chrétienne ? C.S. Lewis.
Certains d’entre vous connaissent déjà un peu Lewis, du moins de nom, ou peut-être seulement par l’intermédiaire du septième art et de l’adaptation du premier volume de l’une de ses œuvres les plus connues: Les Chroniques de Narnia. Il vaut la peine d’en savoir plus, même si les lignes qui suivent n’ont pas la prétention de faire une présentation complète de Lewis, étant donnée la complexité du personnage.
Clive Staples Lewis est ne le 29 novembre 1898 a Belfast, dans ce qui est maintenant l’Irlande du Nord, trois ans après son frère Warren. Le jeune Lewis fit preuve très tôt a la fois d’une qualité intellectuelle certaine, mais aussi d’un fort caractère. Encore enfant, il décida par exemple qu’il n’aimait pas le nom Clive, encore moins celui de Staples, et que désormais il serait appelé Jack… et c’est ainsi qu’il fut appelé par tout le monde. D’ailleurs l’un de ses plus proches amis, J.R.R. Tolkien, n’employait jamais les noms de baptême de Lewis, et on peut même douter qu’il se les rappelait.
Pendant les quelques années de bonheur durant lesquelles sa famille était encore entièrement réunie, des événements particuliers se produisirent dans la vie du jeune Jack, événements certainement banals, mais qui marquèrent profondément Lewis. L’un d’entre eux fut la lecture d’un vieux poème Drapa De Tegner qui réveilla en lui une langueur qui ne le quitta jamais.
A cette époque, toujours enfant, il ne su que faire de ce « sentiment » trop envahissant, et il n’essaya pas de chercher a savoir ce qui s’était passé. Cette même langueur le surprit encore deux fois avant qu’il ne trouve enfin la signification de ce sentiment profond qui ne le quittait pas.
En 1908, la mère de Lewis décéda d’un cancer le jour de l’anniversaire de son mari. On peut dire qu’Albert ne se remettra jamais de la mort de son épouse ; il ne surmonta jamais l’énorme charge que représentait l’éducation de deux enfants. C’est ainsi qu’après quelques courtes années, Lewis fut envoyé en Angleterre pour poursuivre son éducation. Il eut un brillant parcours académique, sauf en mathématiques, mais en même temps, son parcours éducationnel le conduisit, autour des années 1913, a rejeter la foi chrétienne qui avait été celle de ses parents. Il était beaucoup plus intéressé par la littérature nordique et bien d’autres mythes pour s’intéresser a cette foi. Je ne débattrai pas des raisons qui l’ont amené a affirmer la non existence de Dieu : il y a tant de possibilités, comme nous le savons trop bien !
Ce n’est qu’en 1916, après deux ans de cours particuliers avec un nomme W.T. Kirkpatrick (qui introduisit Lewis a une pensée très rationaliste, ce qui l’aidera plus tard a répondre a l’accusation d’irrationalisme de la foi chrétienne), que Lewis arriva a Oxford qu’il ne quitta que deux fois, la première pour servir dans l’armée de Sa Majesté lors de la Première Guerre Mondiale, et la deuxième fois en 1954 lorsqu’il accepta un poste de professeur a Cambridge (même s’il resta habiter a Oxford). Son parcours a Oxford fut couronne de succès, tout comme le parcours de celui qui allait devenir l’une des personnes les plus marquantes dans sa vie: Tolkien. Apres son retour de France, blesse, Lewis commença a donner des « tutorats » a Oxford, et fut très apprécié dans ce poste qu’il conserva pendant près de trente ans.
L’année 1931 fut certainement la plus importante pour Lewis puisqu’elle le vit revenir définitivement a la foi chrétienne, et devenir l’un de ses plus habiles défenseurs. En 1931 donc, Lewis, toujours athée, entre poursuite et fuite de cette « langueur » dont j’ai déjà parlé, passa un week-end avec Tolkien et un autre professeur, Hugo Dyson. Lors de cette soirée, une vive discussion s’engagea sur le thème des mythes. Les trois amis étaient passionnes par ce même sujet et la conversation continua tard dans la nuit. Au cours de la conversation, la foi chrétienne s’introduisit sans vraiment y avoir été invitée par Lewis. Mais c’était sans compter sur Tolkien et Dyson qui, bien que partageant avec Lewis la charge d’enseignement et la passion pour les mythes, ne partageaient pas, loin de la, son rejet de la foi chrétienne.
Il serait trop long d’expliquer ce que les trois amis échangèrent ce soir-la, discussion qui mena quelques mois plus tard Lewis a la foi au Dieu trinitaire. L’un des éléments majeurs que Tolkien et Dyson essayèrent de montrer a Lewis (avec succès) c’est que ce dernier n’avait aucun mal a « accepter » les récits mythologiques parlant d’un dieu qui meurt et qui ensuite revient a la vie. Cela faisait même partie de la grandeur des mythes, de l’appel profond qui résonne chez ceux qui aiment les récits mythologiques. Cependant, lorsqu’il était question du récit historique (je souligne que pour Tolkien et Dyson c’était l’une des différences fondamentales entre la Bible et les mythes), de la résurrection de Jésus-Christ, Lewis refusait complètement d’entamer la moindre conversation et rejetait le récit biblique.il me semble que Tolkien essaya de lui montrer qu’il y avait une grande incohérence dans son comportement et que cela était du a de nombreux a priori qu’il avait contre la foi chrétienne. Son rejet n’était pas le fruit d’une grande réflexion sur la foi chrétienne mais était la conséquence d’a priori qu’il n’appliquait pas a d’autres récits qui parlaient du même sujet (a savoir, ici, une résurrection). D’une certaine manière, Tolkien et Dyson « assuraient » Lewis de ne pas être intellectuellement honnête comme il devait l’être, ce qui certainement donna a Lewis a réfléchir, surtout qu’a cette même époque, les dernières défenses de Lewis contre la foi chrétienne commençaient a s’effriter, et sa langueur intarissable devenait de plus en plus vive. Mais, plus que cela, Tolkien montrait a Lewis qu’il y existait bien une « langueur » que la plupart d’entre nous rencontrent un jour ou l’autre. Mais alors que Lewis avait relie cela aux mythes, a un sentiment de « grandeur épique », Tolkien le relia au Dieu trinitaire qui imprima lui-même ce sentiment en l’homme en le créant a son image (ce que Calvin appela le « sens de déité »). Lewis en vint finalement a reconnaître en Christ le Dieu crucifie et ressuscite.
Lors de sa conversion, Lewis découvrit donc enfin le nom de cette langueur qui s’était emparée de lui tant d’années auparavant, et a laquelle il avait, d’une manière ou d’une autre essayé d’échapper : Joie. Non pas la joie qu’on éprouvé lorsqu’on ouvre un cadeau par exemple. Quelque chose de bien plus reel, de bien plus vrai, de bien plus profond : la Joie retrouvée de se savoir créé a l’image de Dieu. La Joie retrouvée de la communion avec Dieu.
Le reste de la vie de Lewis est passionnante! Il pourrait être question de son incroyable mariage avec l’américaine Joy Davidman, une dizaine d’années avant sa mort (en 1954), de ses arguments pour la défense de la foi chrétienne, de ses oeuvres de science-fiction (la Trilogie Cosmique) ou de fantasy (Les Chroniques de Narnia)…
Je ne mentionnerai qu’une dernière chose, en essayant de résumer la vie de Lewis. Le plus important a conserver de Lewis, c’est le Lewis-le-défenseur de la foi chrétienne. Il ne considérait pas que cela était réservé a ceux qui « savent comment faire » ou a ceux qui sont vraiment des « apologètes » comme on dit. C’est le rôle de tout chrétien… même si cela ne veut pas dire que nous pouvons tous faire comme Lewis ! Une chose cependant : si nous regardons a Lewis l’apologète, une chose revient tout le temps. Il n’était pas conforme a son temps. Il défendait l’existence des miracles, il rejetait le « modernisme », ainsi que les nouvelles définitions attachées a certains mots (comme amour, sexualité, nature, conscience, monde etc.). Lewis était donc un chrétien pour qui « être dans le coup » n’était pas important ; un chrétien qui ne cherchait pas a adapter ce qu’il croyait aux objections qu’on lui faisait, mais qui cherchait plutôt a montrer que la plupart de ses détracteurs étaient comme il l’avait été un jour : rejetant la foi chrétienne a priori. La vie même de Lewis nous donne l’exemple d’une foi qui ne cherche pas a passer « inaperçue » en s’adaptant, une foi qui n’hésite pas a être non conforme a la société dans laquelle elle vit car la foi sait avoir de vraies raisons, les seules vraies raisons, pour agir et croire ainsi.
Enfin, Lewis montra comment la foi chrétienne seule répond a la langueur que nous avons tous en nous, que nous sachions ce après quoi nous languissons ou que nous ne le sachions pas (comme Lewis un temps). La Joie de re-trouver Dieu. Lewis retrouva la Joie de la pleine communion avec Dieu, dans la gloire, le 22 Novembre 1963.